Cette recension critique, tout en saluant la traduction en français, vingt ans après leur publication originale, des articles de l’historien moderniste Roger Ekirch qui invitent à historiciser le sommeil – articles inspirateurs de plusieurs travaux historiques et sociologiques outre-atlantique –, pointe les limites d’une démarche principalement généalogique. Partant d’une constatation établie par les savoirs médicaux actuels constituée au sein de notre propre contemporanéité – celle du bouleversement des rythmes biologiques du sommeil par la lumière artificielle –, Roger Ekirch cherche à en déduire les modifications du sommeil dans les sociétés du passé, opposant un sommeil pré-industriel et pré-éclairage publique « naturel » et universel, qu’il suppose biphasique, à un sommeil artificiel imposé par la modernité. L’appareil critique de cette édition française, s’il propose une mise en perspective, laisse de côté des travaux historiographique plus récents, qui nuancent fortement les théories proposées par l’historien.